Le gouvernement a lancé fin 2017 le programme « action publique 2022 » qui constitue une nouvelle étape de la transformation numérique des administrations. Les 250 démarches les plus courantes doivent être dématérialisées d’ici fin 2022. Si ce processus de dématérialisation offre de nouveaux moyens d’accès aux services publics et permet de simplifier l’accès aux informations et aux documents administratifs, pour une majorité d’usagers il comporte aussi un risque de recul de l’accès aux droits et d’exclusion pour nombre d’entre eux.
Dans notre champ (celui de l’intervention sociale), Plantard[1] distingue deux dynamiques de changement. Une première, exogène, « correspond à une actualisation des problématiques sociales qui sont « traditionnellement » l’affaire du secteur social et qui se déploient aujourd’hui dans un environnement devenu numérique » (notamment la dématérialisation des services publics et leur accélération récente). Une seconde, endogène, concerne les évolutions des pratiques professionnelles (de suivi, d’accompagnement) et les questionnements que cela soulève.
Dans ce diagnostic, c’est la dynamique exogène qui a été étudiée et ses conséquences auprès des publics. Depuis de nombreuses années, les enquêtes montrent la démocratisation de l’accès aux outils numérique[2]. Pour autant, « démocratisation des outils ne signifie pas une égalité sociale des pratiques[3] ».
Selon le profil socio-démographique des individus, l’accès au matériel, mais aussi aux compétences numériques, sont nettement dépendants de certaines variables (âge, composition familiale, revenus…). Si certaines sont connues du champ de l’intervention sociale et entrent en résonnance avec des phénomènes bien documentés (précarité, accès au logement…), certaines variables sont apparues comme propres au phénomène de fragilité numérique des publics, créant de fait des inégalités aux logiques singulières. Parallèlement, nous avons commencé à mettre en évidence qu’un nombre important et pluriel d’acteurs déployait des solutions en lien avec la fragilité numérique des populations, avec parfois peu de coordination, et peu d’outils et de pratiques d’évaluation des besoins des personnes.
Dans ce contexte, il apparaît comme incontournable de penser une organisation coordonnée territorialement autour de la fragilité numérique. C’est une des ambitions de la Banque du Numérique en vue de répondre aux besoins des populations en tout point du territoire.